Le diagnostic du bâtiment : une responsabilité transversale
Compte rendu de la réunion du 26 septembre 2013 de la Commission de droit immobilier du barreau de Paris
La sous-commission « Responsabilité et assurance des constructeurs » de la Commission ouverte de droit immobilier du barreau de Paris tenait, le 26 septembre 2013, sous la responsabilité de Michel Vauthier, avocat à la cour, une réunion consacrée au » diagnostic du bâtiment « , à laquelle intervenait Damien Jost, Avocat au barreau de Paris. Présentes à cette occasion, les éditions juridiques Lexbase vous proposent de retrouver le compte-rendu de cette réunion.
Michel Vauthier a justifié le thème de cette réunion, qui avait déjà été traité un an auparavant, (cf. Diagnostic immobilier : les responsabilités connexes — Compte-rendu de la réunion de la Commission de droit immobilier du barreau de Paris, Lexbase Hebdo n˚ 507 du 29 novembre 2012 — édition privée N° Lexbase : N4671BT8), par le fait que la responsabilité des diagnostiqueurs constitue un droit de la responsabilité en pleine édification. En effet, d’une part, l’obligation de diagnostic est récente au regard de la jurisprudence et du temps nécessaire pour que le contentieux soit porté devant la Cour de cassation ; d’autre part, les modifications intervenues en matière d’obligation de contrôle et d’obligation de diagnostic ne cessent d’évoluer (DPE, diagnostic amiante…).
Il est donc important pour les avocats d’analyser les principes qui sont en train de se mettre en place, afin d’anticiper les problèmes, mais également de participer à la construction de ce droit à travers les arguments développés devant les juges.
Le sujet est d’importance, également, car il ne concerne pas la seule responsabilité des diagnostiqueurs, mais également la responsabilité transversale de tous les participants à la chaîne de l’acte de construire. Le diagnostic constitue donc un élément de responsabilité important. La précédente réunion s’était achevée par la mention d’un arrêt (Cass. civ. 3, 12 septembre 2012, n˚ 11-18.122, FS-D N° Lexbase : A7425ISS) qui avait retenu la condamnation du diagnostiqueur termites -qui avait conclu à l’absence de termites alors que l’immeuble était infesté— à la réparation intégrale de l’immeuble ; il semble que la jurisprudence évolue aujourd’hui, au contraire, vers une responsabilité partagée entre les différents acteurs, ainsi que les arrêts présentés infra le démontrent.
Selon Damien Jost, la décision précitée du 12 septembre 2012 était en effet marquante en ce qu’elle avait prononcé la condamnation du diagnostiqueur à démolir le bâtiment et à le reconstruire, le diagnostiqueur ayant relevé des traces de termites dans le bâtiment principal, et quelques traces dans une dépendance ; la dépendance avait finalement été vendue séparément du bâtiment principal, et s’était avérée totalement infestée. Cette décision, même si elle constitue un cas d’espèce, est inquiétante pour les diagnostiqueurs. Damien Jost relève ainsi que le contentieux est relativement intensif, et évolue en se structurant, même si les décisions ne sont pas toujours convergentes.
Pour bien comprendre les principes de ce droit nouveau, il convient de revenir sur la notion de « diagnostic », qui est encore relativement floue (ce qui constitue d’ailleurs l’une des raisons de l’importance du contentieux), avant d’analyser quelques exemples jurisprudentiels.
1. La notion de diagnostic
Selon une formule utilisée par Michel Vauthier, le diagnostiqueur est voué à subir le sort du thermomètre. En effet, il se retrouve assimilé au mal qu’il a révélé.
Or le diagnostic immobilier impacte l’ensemble de la chaîne de l’immobilier (la vente, la construction ou la démolition). Le diagnostic est donc assimilé à un thermomètre en ce sens qu’il révèle un symptôme apparent.
Cette idée du symptôme apparent est essentielle et doit toujours être gardée à l’esprit, notamment lors de la lecture du diagnostic.
1.1. Le fond du diagnostic immobilier
Le diagnostic a pour objet de décrire une réalité par des signes apparents ; il s’agit d’envisager une réalité que l’on ne peut directement appréhender.
La pratique du diagnostic se révèle extrêmement périlleuse pour son opérateur. L’opérateur de diagnostic doit trouver son positionnement entre deux postures inverses : en dire trop (extrapoler ce qu’il voit, au risque d’alarmer inutilement le donneur d’ordre), ou pas assez (s’en tenir à une description pure, et s’en tenir là). Quelle que soit la posture choisie, il pourra toujours se voir reprocher d’avoir sous-estimé ou au contraire surestimé les risques. C’est ici qu’apparaît le problème de la transversalité, liée aux différentes interprétations du diagnostic.
Le contenu du diagnostic est donc un mode de description de la réalité très particulier, en ce sens qu’il ne s’intéresse qu’à des signaux apparents. Il en résulte que, en aucun cas, le diagnostic n’exprime une certitude, alors que le lecteur recherche précisément une certitude absolue ; c’est là tout le paradoxe.
C’est ainsi que certains diagnostiqueurs intègrent une part de conseil, en conseillant au donneur d’ordre de procéder à des investigations complémentaires. Mais cela n’est pas toujours le cas. Cela relève alors de la responsabilité du professionnel (de la vente, de la construction, de la gestion d’immeuble) que de conseiller au propriétaire un complément d’investigation.
Un diagnostic immobilier n’a donc pas vocation à garantir, ou à attester un résultat. Cette problématique se retrouve avec davantage d’acuité dans le cas du diagnostic amiante. En effet, le droit positif distingue entre différentes situations qui représentent soit un danger extrême et immédiat, et d’autres situations dans lesquelles l’amiante, dans certaines conditions, ne présente aucun danger immédiat (à condition qu’il n’y ait pas de travaux de perçage, etc. et que les fibres d’amiante soient encapsulées dans un matériau inerte comme le ciment), le droit n’imposant dans ce cas aucune obligation de retrait.
Le diagnostic pose également un problème d’interprétation. Ainsi, lorsque le rapport conclut selon la formule « il n’a pas été repéré de matériaux et de produits amiantés », Damien Jost estime que, dans 9 cas sur 10, le lecteur, y compris le notaire, interprétera cette conclusion comme signifiant : « il n’y a pas d’amiante dans l’immeuble », ce qui est une erreur d’interprétation, compréhensible de la part du profane, mais moins de la part du professionnel. Tous les professionnels doivent en effet être conscients qu’un diagnostic avant vente ne tend pas à l’exhaustivité.
Un autre problème d’interprétation du diagnostic tient à la lecture beaucoup trop hâtive du diagnostic. Il est primordial de lire, non seulement la partie « conclusion », mais également toutes les rubriques du rapport, et notamment la rubrique « constatations diverses », dont on peut relever que l’intitulé est particulièrement dévalorisant eu égard à son importance. En effet, figurent au contraire dans cette rubrique des informations essentielles (telles que « présence d’injecteurs dans la charpente » lesquelles traduisent un traitement antérieur contre les insectes).
Il convient donc de lire non seulement, toutes les rubriques du rapport du diagnostic, mais également comprendre que l’on dispose seulement, avec le diagnostic, de la « partie émergée de l’iceberg » ; autrement dit, il existe toute une partie de la réalité qui n’a pas pu être examinée. Tout ce qui ne ressort pas dans le diagnostic renvoie alors à la responsabilité de chacun des acteurs.
Damien Jost a insisté sur le fait qu’un diagnostic ne constitue pas une expertise. Il faut savoir en effet que la prestation en elle-même, s’agissant d’un diagnostic avant vente (pour un pavillon classique), représente entre une et trois heures de visite pour un tarif qui n’est pas encadré ; par ailleurs, l’établissement du diagnostic comporte des limites matérielles (telle l’interdiction générale de réaliser des sondages destructifs. En effet, dans le cadre d’une vente, le principe est que l’on ne porte pas atteinte à l’intégrité du bâtiment).
Pour résumer, le diagnostic immobilier remplit la fonction d’un indicateur de tendance, ni plus ni moins. Il s’agit de répondre à une question unique : le bien apparaît-il comme exempt ou non de pathologies (amiante, termites, plomb, autre…).
Face aux limites de ce diagnostic, on peut se demander si cet outil, destiné à protéger le consentement de l’acquéreur, revêt une utilité certaine ? Selon Damien Jost, la réponse est très clairement positive, les informations délivrées par le rapport étant signifiantes, à condition de savoir les analyser. On peut d’ailleurs observer que les juges prêtent de plus en plus d’importance à ces informations et à l’utilisation qui en a été faite par les acteurs subséquents.
S’agissant plus particulièrement du diagnostic parasitaire, il faut savoir que les parasites regroupent à la fois les champignons (majoritairement dans le quart nord-ouest ; les deux conditions de sa présence sont l’humidité, et la suppression de la ventilation) et les insectes (quart sud-ouest essentiellement, mais aussi grandes villes, notamment Paris). Il faut savoir que toute trace de termite représente un danger potentiel, de même que toute trace d’un précédent traitement (injecteurs ; trous à intervalles réguliers), permettant de déceler une infestation ancienne (mais dont on ignore le plus souvent la date), sachant que l’éradication totale des parasites est difficile.
1.2. La forme du diagnostic immobilier
Là encore, de même que le diagnostiqueur doit choisir sa posture, entre « en dire trop ou pas assez », il doit opérer un choix entre un langage très accessible, compréhensible par le plus grand nombre, ou un langage très technique répondant à une terminologie conforme à la norme dictée par l’AFNOR, et imposée par les organismes certificateurs (cette deuxième option étant la plus fréquemment retenue).
Ce langage très technique utilisé constitue un enjeu pour le professionnel de la vente ou de la construction. Damien Jost relève la difficulté particulière rencontrée par les notaires à traduire le contenu du diagnostic dans l’acte de vente.
Par exemple, dans le cas d’un diagnostic parasitaire, est souvent utilisée la formule d' »indices d’infestation », laquelle doit être comprise au sens des normes édictées par l’AFNOR, et qui équivaut donc à l’infestation elle-même. La norme édicte en fait une présomption normative.
2. Applications jurisprudentielles
Il convient de distinguer les situations correspondant, d’une part à un diagnostic établi avant la vente de l’immeuble, et d’autre part un diagnostic établi avant travaux ou démolition.
2.1. Diagnostic avant vente
- CA Rennes, 20 décembre 2012, n˚ 09/08 071 (N° Lexbase : A2203IZM)
Cet arrêt est intéressant en ce qu’il retient la responsabilité d’une agence immobilière qui n’a pas exigé du vendeur la production d’un état parasitaire et, à défaut, de ne pas avoir conseillé à l’acquéreur d’exiger un tel diagnostic avant de s’engager.
Dans cette affaire, l’agence avait donc trouvé un acquéreur, et rédigé le compromis de vente. L’acquéreur avait découvert la présence de mérule lors de travaux d’aménagement. S’agissant de l’agent immobilier, il convient de relever les termes de la motivation de la cour : « un agent immobilier est un professionnel de l’immobilier et non un professionnel du bâtiment, et qu’ainsi, il ne peut lui être reproché de ne pas s’être aperçu de l’existence de désordres non apparents pour un acquéreur profane ».
Elle relève, par ailleurs, que « des erreurs classiques ont été commises pendant la rénovation (pose de fenêtres étanches sans création d’une VMC), qui ont contribué à accroître l’humidité présente dans l’immeuble, que seul un professionnel du bâtiment pouvait déceler ». L’agent immobilier avait connaissance de cette rénovation, mais ne pouvait déceler ces erreurs. Cela étant, le premier manquement reproché à l’agent immobilier est d’avoir fait signer le compromis sans avoir exigé de son client la réalisation par son client d’un état parasitaire, et à défaut, conseillé aux acquéreurs potentiels d’exiger cet état avant de s’engager, et ce en raison du problème d’humidité forte (indice de pathologie), synonyme -pour les professionnels exerçant dans la région- de risque de mérule.
L’agent immobilier s’est retrouvé condamné au paiement des travaux de reprise pour une somme de 10 000 euros.
- CA Nîmes, 23 novembre 2004, n˚ 02/00 712 ([LXB=A0025KPM])
Dans cette affaire, il a été reproché au notaire d’avoir laissé le vendeur utiliser un diagnostic parasitaire périmé lors de l’acte authentique.
Il faut savoir que la durée de validité de l’état parasitaire était de trois mois à l’époque des faits (aujourd’hui six mois). La promesse de vente avait été conclue sous condition d’obtention d’un état parasitaire négatif. Le diagnostic alors réalisé concluait un résultat négatif, mais celui-ci était en fait périmé lors de la réitération de la vente par acte authentique.
Après la vente, l’acquéreur, qui avait constaté la présence de termites, s’en était référé au notaire, lequel avait proposé aux parties la conclusion d’un accord transactionnel. Mais les juges ont estimé le montant de cet accord transactionnel dérisoire par rapport au montant des désordres en cause. Pour retenir la responsabilité du notaire, la cour d’appel a relevé que le notaire, qui ne pouvait ignorer le risque encouru dans la région, avait pris la responsabilité de fonder l’acte authentique sur un certificat périmé alors qu’il connaissait l’importance de cette pièce aux yeux de l’acquéreur, alors que l’acte sous seing privé avait été conclu sous la condition suspensive de la production d’un état parasitaire négatif. Selon la cour, en choisissant d’éviter au vendeur des frais supplémentaires pourtant obligatoires, puis en cherchant ensuite à se couvrir par une transaction nulle, le notaire a failli aux plus élémentaires devoirs de son état.
- CA Douai, 1ère ch., sect. 1, 21 mars 2005, n˚ 03/02 139 (N° Lexbase : A6335IXW)
Dans cette affaire, le notaire disposait, pour la vente litigieuse, d’un rapport d’état parasitaire négatif. Or, cinq ans auparavant, le même notaire avait reçu l’acte de vente antérieur, pour lequel avait été signalée une infestation de mérule. Par cet arrêt du 21 mars 2005, les juges ont retenu, à juste titre selon l’intervenant, que le notaire ne pouvait pas supposer légitimement que la pathologie avait disparu sans avoir été informé d’un quelconque traitement.
« La faute du notaire qui n’a pas informé M. et Mme F. du problème de mérule affectant l’immeuble en 1996 est constante alors que celui-ci a un devoir de conseil à l’égard des deux parties à l’acte. Le fait que le notaire n’ait pas participé à la négociation et n’ait pas visité l’immeuble préalablement à la vente ne saurait l’exonérer de son obligation d’information et de conseil lors de l’établissement de l’acte notarié. La SCP notariale ne peut valablement soutenir pour s’exonérer de sa responsabilité qu’elle pensait que les réfections avaient été effectuées depuis 1996 alors qu’il lui appartenait de s’en informer auprès des vendeurs et de lever toute ambiguïté. La faute du notaire a contribué à la réalisation de la vente et donc à l’entier préjudice subi par les époux F.. […] Dans ces conditions, il convient de partager par moitié la responsabilité entre le notaire et la SCI ».
Selon Damien Jost, cette solution est parfaitement transposable au cas du diagnostic amiante, c’est ce qu’il soutient dans une affaire similaire.
- CA Caen, 9 avril 2013, n˚ 08/01 574 (N° Lexbase : A7515KBX)
Il faut retenir de cette décision qu’un agent immobilier ne peut ignorer les indices flagrants d’une pathologie immobilière locale, telle que la mérule, et ce bien qu’il ne soit pas diagnostiqueur. Il en résulte que cette connaissance aggrave le devoir de conseil.
En l’espèce, peu après la vente en la forme authentique, l’immeuble s’était révélé à l’acquéreur infesté de parasites (insectes et mérule). La responsabilité de l’agent immobilier est retenue au regard de deux circonstances : la localisation de l’immeuble et l’humidité apparente.
Il convient de relever la motivation des juges d’appel : « l’agent immobilier a pour mission de mettre en rapport un vendeur et un acquéreur potentiel et de rédiger le contrat de vente. Pour ce faire, il doit nécessairement connaître les caractéristiques essentielles de l’immeuble objet de la vente, ce qui lui permet d’utilement renseigner les parties et de conseiller son mandant. Cela justifie de fait l’importance de la commission versée à l’agence par l’acquéreur. Il s’ensuit que l’agent immobilier doit s’assurer de l’état général de l’immeuble. Même si un agent immobilier n’est pas un professionnel du bâtiment, ses fonctions et son expérience lui permettent d’apprécier l’état sanitaire d’un immeuble. En l’espèce, l’expert a relevé que la présence d’insectes xylophages et l’humidité anormale de l’immeuble étaient apparentes. Si cette situation a pu ne pas alerter particulièrement [l’acquéreur], elle aurait dû alerter un professionnel de l’immobilier, dans une région (le Perche) où les pathologies des bois liées à l’humidité sont récurrentes et souvent graves. […] Un agent immobilier local ne pouvait donc ignorer cet état de fait ».
Ainsi, dans certaines régions, tout professionnel doit être en mesure de relier un taux d’humidité anormale à une pathologie potentielle et alerter un acquéreur.
2.2. Diagnostic avant travaux (ou démolition)
Si les textes différencient le diagnostic avant travaux (arrêté du 2 janvier 2002), et celui avant démolition, c’est totalement similaire (cf. norme NF X 46-020, en matière d’amiante).
L’obligation de réaliser le diagnostic avant travaux, en théorie, pèse sur le chef d’entreprise qui va devoir assurer la protection des intervenants travailleurs. Toutefois, en pratique, il faut savoir que les rapports de diagnostic avant vente mentionnent très souvent à l’attention du futur propriétaire, qu’un nouveau diagnostic sera requis en cas de réalisation de travaux.
En effet, il faut savoir que le diagnostic avant travaux permet d’avoir une vision nettement plus complète, sachant que, contrairement au diagnostic réalisé avant vente, il permet des sondages destructifs. Il permet donc de réaliser une recherche plus approfondie. Toutefois, ce diagnostic n’atteint sa pleine efficacité qu’à la condition que le donneur d’ordre (le commanditaire) produise au diagnostiqueur la localisation précise des zones de travaux ; il convient de fournir un plan précis des travaux futurs. A contrario, les sondages seront dépourvus de toute pertinence.
Par ailleurs, et en tout état de cause, un diagnostic immobilier, même lorsqu’il est réalisé avant travaux, comporte des limites, en ce qu’il ne reste qu’un diagnostic. Par exemple, dans le cas du diagnostic « amiante », le diagnostic réalisé avant travaux n’a pas vocation à attester du volume d’amiante réellement présent et donc du coût de retrait du matériau. Aussi, en présence d’un diagnostic révélant la présence d’amiante, Damien Jost estime qu’il convient de s’adresser à une entreprise de désamiantage, si l’on veut évaluer le coût de retrait de l’amiante ; en effet, cette entreprise pourra évaluer, sous sa responsabilité, le volume d’amiante présent dans les lieux.
Maître Vauthier a également souligné l’obligation d’information pesant sur le maître d’ouvrage, qui est tenu de délivrer le dossier d’interventions ultérieures sur l’ouvrage (DIUO) (cf. C. trav., L. 4532-16 N° Lexbase : L1704H9Y), qui rassemble, sous bordereau, tous les documents tels que les plans et notes techniques, de nature à faciliter l’intervention ultérieure sur l’ouvrage, ainsi que le dossier technique regroupant les informations relatives à la recherche et à l’identification des matériaux contenant de l’amiante (C. trav., art. R. 4532-95 N° Lexbase : L9680H9E).
- CA Paris, Pôle 4, 6ème ch., 9 septembre 2011, n˚ 08/07 929 (N° Lexbase : A4302H7H)
Un nombre croissant de sinistres concerne des travaux au cours desquels sont découverts des matériaux amiantés n’ayant pas été repérés préalablement. Au-delà de l’erreur de diagnostic, toujours possible, la jurisprudence rappelle que le maître d’ouvrage et les intervenants à l’acte de construire sont tenus à leurs propres obligations. Bon nombre de sinistres font apparaître que le chantier a débuté prématurément, sur la base de diagnostics incomplets, voire inappropriés (par exemple, diagnostic avant vente, et non diagnostic avant travaux ou démolition), et dont il ressort un volume d’amiante imprévu, générant des coûts supplémentaires liés au désamiantage et au retard pris par le chantier.
Dans son arrêt rendu le 9 septembre 2011, la cour d’appel de Paris est venue rappeler que le planning d’une opération lourde (réhabilitation, reconstruction) doit intégrer les contraintes imprévues. Elle déboute le bailleur social maître d’ouvrage, qui n’était pas un particulier mais un professionnel, estimant que même en présence de fautes commise par le diagnostiqueur, celles-ci sont sans lien de causalité directe avec le préjudice allégué.
La cour a, d’abord, rappelé que le diagnostiqueur n’était en aucun cas responsable de la présence d’amiante, ni de sa quantité, ni du coût de son retrait, ni du calendrier établi par le maître d’ouvrage pour la réalisation de son ouvrage.
Elle relève, ensuite, que si l’absence d’amiante était une condition déterminante de l’acquisition pour le bailleur social, il aurait fallu faire procéder avant la vente à un examen complémentaire, rappelant l’absence de valeur exhaustive du diagnostic avant vente.
Elle ajoute qu’il n’existe donc aucune causalité directe entre le retard de livraison, et le désamiantage, le retard étant dû à la mauvaise gestion de son projet immobilier par le bailleur social, ayant décidé de prendre des engagements prématurés avec des locataires, alors que des retards de livraison dans un projet de cette ampleur étaient parfaitement prévisibles, qu’ils soient dus au désamiantage -prévisible dans son principe – à des incidents de chantier, à la liquidation d’entreprises, à des intempéries, etc.. – Il appartenait, dès lors, au maître d’ouvrage, de supporter les conséquences de ces retards prévisibles sur des engagements qu’elle avait elle-même pris dans son intérêt exclusif.
Maître Vauthier souligne que les fautes retenues ainsi commises par le maître d’ouvrage, risquent d’influencer l’appréciation des recours que celui-ci va exercer contre les intervenants à l’acte de construire.